La livraison : moteur de la relance post Covid ?
La livraison de produits - alimentaires ou non – a pris une place majeure dans l'économie américaine. La pandémie a conduit bon nombre de clients à se tourner exclusivement vers l’achat en ligne, et la livraison est à présent une offre que chaque retailer ou restaurant se doit de proposer et de maîtriser. Cette intensification de la livraison pour les achats du quotidien devrait constituer une tendance forte de 2021 et de nombreux chiffres viennent en attester.
Le boom des applications de livraison
Si de nombreux clients américains ont pu continuer à faire leur shopping en magasin durant la pandémie, une part importante de la population a mis le cap sur le « tout-livraison » pour les courses quotidiennes : du restaurant à l’épicerie. En témoignent les données d'Apptopia, qui montrent que les téléchargements d'applications de livraison ont explosé durant la pandémie.
Dans le même temps, poussés par la panique des consommateurs, les magasins d’alimentation ont vu leurs revenus augmenter en 2020 et le Curbside Pickup - ou click and collect - est désormais fortement à la hausse.
Les données d'Apptopia suggèrent d’ailleurs que la flambée de la commande en ligne pourrait s'avérer fructueuse pour cette catégorie d’acteurs : le 15 mars, Instacart, Walmart Grocery, Shipt et Target ont ainsi enregistré un record de téléchargement de leurs applications, avec une augmentation respective de 218%, 160%, 124% et 98% par rapport au mois de février.
Les recrutements suivent
Les habitudes d'achat pendant la pandémie ont également profondément remodelé le marché du travail américain : la plupart des nouvelles offres d’emplois proviennent des industries du transport et de l'entreposage. Le virage des ménages vers le e-commerce entraîne logiquement une frénésie de recrutement dans les industries de la logistique.
Les emplois dans le secteur de l'entreposage ont notamment augmenté de 8% (97 000 unités) depuis février, tandis que les emplois de coursiers et de livreurs ont connu une croissance de 22% (182 000 postes) ! Dans le détail :
- Instacart a annoncé vouloir recruter 300 000 shoppers durant la pandémie.
- Amazon a engagé 427 000 personnes en 10 mois (pratiquement 2800 nouveaux employés par jour), dont de nombreux emplois dédiés au fonctionnement des entrepôts et à la livraison. Il ne faut pas oublier par ailleurs que de nombreux livreurs Amazon sont des prestataires indépendants et ne figurent donc pas dans ces chiffres.
- Fedex a intégré 70 000 personnes
- UPS a embauché 100 000 employés
Les startups à la manœuvre
L’histoire des startups a montré que quel que soit leur métier ou le degré de créativité de leurs fondateurs, ces jeunes pousses ont souvent besoin d'une opportunité qui leur confère un avantage décisif par rapport aux opérateurs historiques. Le Covid pourrait être l’un de ces facteurs, et la dynamique de levée de fonds par des acteurs spécialisés semble indiquer qu’une bonne part d’entre eux va profiter de la période pour pérenniser ses outils et franchir un cap majeur.
- Instacart a levé 200 millions de dollars cette année pour une valorisation de 17.7 milliards de dollars.
- Doordash, après avoir levé 400 millions cette année, est désormais valorisée à 16 milliards
- Il est très difficile d'évaluer UberEats, car son offre fait partie de l’offre globale de Uber, mais la pandémie a transformé cette offre en corne d’abondance pour la maison mère. Pour l’entreprise californienne, le marché de la livraison pèse déjà davantage que celui du VTC…
Du restaurant à l'épicerie
Mais ces acteurs ne comptent pas en rester là : après la livraison de repas, proposée aux restaurants, les géants du « food delivery » s’attaquent désormais à la livraison d’épicerie.
Depuis le mois d'août dernier, les leaders DoorDash et UberEats ont commencé à proposer des services de livraisons des commandes de magasins d’alimentation pour entrer de plain-pied dans le deuxième secteur de la livraison à domicile. Portées par ce nouvel engouement des spécialistes de la logistique de proximité, les commandes alimentaires en ligne devraient atteindre 21,5% du total des ventes d'épicerie aux États-Unis d'ici 2025. Elles feraient ainsi plus que doubler leur part actuelle du marché, selon une nouvelle étude réalisée par Mercatus.
Les prévisions de croissance sur cinq ans marquent une augmentation de plus de 60% par rapport aux estimations des ventes en dollars pré-coronavirus de la pandémie pour l'épicerie en ligne.
Ces chiffres montrent à quel point la livraison alimentaire va rester ancrée dans les habitudes des consommateurs américains. Il est donc clair que les retailers vont devoir adapter leur offre, leurs équipements en magasin et leur logistique à ce nouvel état de fait.
Sans compter que de nouveaux acteurs – et non des moindres – lorgnent sur ce secteur en plein développement : après le rachat de la plate-forme de livraison de boissons alcoolisées Drizly par Uber pour 1.1 milliard de dollars, c’est au tour d’Amazon d’annoncer ses ambitions. La firme vient en effet de finaliser le rachat de PillPack, spécialiste de la livraison de médicaments… Le ballet urbain des livreurs à vélo, scooter ou même robotisés n’est donc pas prêt de ralentir.
Aux États-Unis, la livraison fait sa révolution !
Parmi les nombreuses initiatives “frictionless”, qui visent à limiter au maximum les irritants dans le parcours d’achat, c’est à n’en pas douter dans le domaine du dernier kilomètre que les progrès les plus importants sont à rechercher. Poussés par la concurrence féroce des géants du secteur, et renforcée par les contraintes liées à la crise sanitaire, les acteurs du retail explorent toutes les possibilités technologiques pour livrer toujours plus vite, plus loin, et plus fort !
« Il est désormais incontournable pour les acteurs du marché de proposer un service de livraison à la fois rapide et parfaitement fiable », estime Brie Carere, vice-présidente exécutive et directrice marketing et communication chez FedEx. « La possibilité d’être livré le jour même est même devenu un critère de choix majeur lorsque les consommateurs en ont vraiment besoin, comme c’est le cas pour la pharmacie ou l'épicerie. »
Quand le J+1 devient la norme
Au cours de l'année écoulée, Amazon a augmenté la pression sur ses compétiteurs avec son passage agressif à la livraison le jour suivant pour les membres Prime, tandis que Walmart et Target ont réagi en élargissant leurs capacités de livraison à J+1 et même au jour J. Une compétition qui profite aux clients finaux, qui ont vu en l’espace de quelques mois l’offre de livraison gagner en rapidité et en précision, pour un service toujours irréprochable.
Selon une enquête réalisée en janvier 2020 par Convey, un fournisseur de logiciels de logistique, la principale raison pour laquelle les internautes américains ont acheté sur Amazon est la livraison rapide et gratuite (79,8%), dépassant même la large sélection (68,9%) et les meilleurs prix (49,2%), critère de préférence « historiques » de la marque. Mais quels sont les outils actuels et futurs qui permettent de livrer les américains avec efficacité ?
BOPIS : Buy Online, Pickup In Store
Derrière cet acronyme, se cache l’une des grandes tendances de l'année aux États-Unis. Bien que cette technique soit ancienne en France et en Europe, les États-Unis découvrent à leur tour cette option pour les achats en ligne : récupérer les produits achetés aux abords du point de vente, sans avoir à sortir de leur voiture ou d’entrer en magasin.
Intérêt pour le client : la majorité des commandes passées en ligne sont prêtes en 1 ou 2 heures et il peut récupérer ses achats rapidement. Le magasin n’a aucun frais de livraison à assumer, ni de logistique complexe à gérer.
Cependant, bien que cette technique soit très populaire, plus de six acheteurs sur 10 déclarent avoir une « expérience mitigée ou généralement mauvaise » avec le processus, selon une étude de marché du fournisseur d'automatisation et de robotique GreyOrange.
Instacart rebat les cartes avec ses "personal shoppers"
Sous la pression d'Amazon, les magasins sont en demande de solutions de livraison efficaces et rapides. Un marché porté par de véritables spécialistes (third parties) se développe ainsi pour acheminer les produits aux consommateurs aussi rapidement qu'ils le souhaitent. L’un des principaux acteurs de ce marché est Instacart. Cette entreprise américaine exploite un service de livraison et de récupération de commande alimentaire aux États-Unis et au Canada. Le service permet aux clients de commander des produits d'épicerie auprès des détaillants participants, les achats étant effectués par un personal shopper. D’ores et déjà, Instacart revendique 57% des parts de marché sur les commandes alimentaires aux États-Unis.
Et cette tendance va s’amplifier : Delivery Drivers Inc. (DDI) un des leaders américains dans le domaine de la gestion du dernier kilomètre vient d’annoncer son souhait de recruter jusqu'à 140 000 livreurs d’ici à la fin 2021 pour répondre à la demande croissante de la part de ses clients !
Amazon affûte ses drones...
Si l’on recherche un outil de livraison rapide, simple et “frictionless”, quoi de mieux qu’un drone ? La technologie est suffisamment sophistiquée pour proposer une gamme de livraison variée, rapide, et surtout parfaitement sécurisée. Des tests sont actuellement en cours aux États-Unis et Amazon est bien sûr au cœur de l'action.
Ces drones sont limités en poids et ne peuvent pour le moment supporter que quelques kilos de charge (ce qui représente une part considérable du volume de commandes), mais ils permettent de pallier de nombreuses contraintes par rapport aux livraisons terrestres traditionnelles. Les drones peuvent ainsi voler à 130km/h tout en évitant le trafic routier et les contacts entre le livreur et le client.
Récemment, Coca-Cola, Walmart et le fournisseur de services de drones DroneUp se sont associés dans une campagne marketing pour livrer des packs de son nouveau soda à la caféine par drone. À n’en pas douter, les drones seront présents dans le ciel de la livraison de demain.